vendredi 7 septembre 2012

Huile d'olive ...

Même imperfection dans la culture des oliviers et la méthode de faire l'huile. Mêmes espoirs, plus grands encore, lorsque les améliorations désirables seront introduites. Car cet arbre est un des principaux revenus de l'île. Il constitue la richesse de la Balagne, l'opulente et « oléfiante » Balagne, dont les habitants, dit le proverbe, sont oints d'huile . Mais il y a des oliviers encore dans le Nebbio et clans le Cap, à Bastia et dans la Casinca, sur les coteaux- qui surplombent. la côte orientale. Il n'y a qu'à parcourir la province de Sartène pour être frappé des ressources qu'elle présente « elle renferme peut-être 20.000 oliviers sauvages qui, dans dix ou douze ans au pis aller, feraient un revenu annuel au moins de 40,000 Livres en évaluant à 40 sols seulement année commune le produit net de chaque pied d'arbre ». Vraiment « la Corse semble être la patrie de l'olivier, tant il y croît et s'y multiplie avec facilité... ; point de village, s'il n'est trop élevé dans la montagne, qui ne soit entouré de ses plantations : il est d'ailleurs beaucoup plus grand et plus robuste qu'en France » . Mais que font les Corses pour se montrer dignes de ce bienfait de la nature ? Rien, absolument rien. Leurs oliviers ne sont « ni greffés, ni entretenus, ni taillés, ni cultivés »: capables de produire presque sans secours une fois qu'ils ont reçu la première culture, ces arbres favorisent à merveille l'indifférence des Corses qui ne voient pas au delà de « la jouissance prochaine » .  On prétend que ce fut un gouverneur génois qui, à force de constance et même de châtiments, les « força » de greffer ceux de la Balagne. Les États de 1781 demandent dix sols de gratification « pour chaque olivier qu'on aurait greffé et par chaque olivier planté et qui aurait poussé deux années de suite, lorsqu'il y en aura eu au moins vingt » : le roi accorde (23 mars 1785). Si la pratique de la greffe se répand, la culture de l'olivier reste dans l'enfance. « Point d'engrais, point de labour au pied de l'arbre, qui permettent aux eaux de pluie de s'infiltrer à travers les terres et d'humecter les racines. Elles sont couvertes d'une croûte dure et impénétrable, telle que la sécheresse et la privation totale de culture ne peuvent manquer de la former» Rien ne nuit davantage au rendement et nos officiers, contemplant cette paresse, s'indignent. « Les Corses ne pourraient-ils au moins, remarque l'officier de Picardie, cultiver le pied de chaque olivier et en arracher les broussailles et les grosses herbes qui ne peuvent que diminuer leur nourriture ? » Car, malgré leur grosseur et leur vigueur, « ces arbres ne produisent presque rien en comparaison de ceux de la Provence » et « l'olive n'est communément pas plus grosse qu'un gros noyau de cerise ». Quant à la cueillette, elle présente un des aspects de cette économie destructive ( feu) que nous avons déjà eu l'occasion de signaler : on abat les olives en janvier et février ; mais la plupart du temps on les laisse sécher à terre sans les ramasser. « J'en demandai la raison, écrit notre officier ; on me répondit qu'il faudrait payer des femmes ou des enfants sur le pied de 20 sols par tête, tandis que les plus laborieux ne pouvaient en ramasser que pour la valeur de 12 sols. » Les olives, recueillies à différentes époques, sont entassées dans les greniers où elles s’échauffent  et elles « ne sont mises sous le moulin que lorsque la plus grande partie tombe déjà en putréfaction ». De là  le « goût âcre » et la « saveur forte » qui « repoussent » cette huile de nos tables. Mais il serait aisé d'améliorer cette situation et le gouvernement encouragea toutes les tentatives M. Thiery, directeur des vivres, ayant loué un verger d'oliviers aux portes de Bastia, fit soigner ces arbres comme en France et fabriquer l'huile avec les mêmes précautions : elle différait de bien peu de celle de France; encore s'agissait-il d'oliviers qui n'étaient pas greffés. Le mot d'ordre fut d'adopter « la méthode de Provence » et c'est celle que suivit le sieur Bertrand qui installa, en 1781, une huilerie à la provençale et reçut de ce fait une gratification de 3.000 livres. Le gouvernement envisagea un dernier moyen pour perfectionner la culture de l'olivier, qui serait d'établir à Bastia ou à Calvi des manufactures de savon. « On objectera peut-être, remarque l'abbé Gaudin, le tort que les manufactures de Marseille recevraient d'un pareil établissement...

 (Louis Villat, La Corse de 1768 à 1789, 1925)



Le couvent de Corbara, quelques oliviers et des traces d'anciennes cultures.


Le colon cherche  à reproduire ses propres techniques dans le pays qu’il vient de conquérir …  En général, et nous le voyons bien ici, il n’est pas tendre et un tantinet arrogant … mais c’est un autre sujet... Nous retrouvons régulièrement ce type de comportement dans les jardins anciens … intervenir sans vouloir comprendre le passé, les usages, les techniques … Je vous donne un exemple que je trouve intéressant : la taille de l’Hibiscus syriacus. Savez vous que l’on ne pratique pas la même taille aux domaines de Versailles, de Compiègne et de Saint-Cloud … Trois anciens domaines de la couronne et pourtant trois techniques différentes …  en deux mots : Versailles ne laisse qu’un rameau secondaire et le taille court, Saint-Cloud laisse quasiment tous les rameaux secondaires qui sont taillés sévèrement, Compiègne ne s’embête pas, il recèpe … ne vous emballez pas, les trois techniques se valent … il y a peu de différence de résultat et il fallait être bien tordu pour noter ce détail … Je rappelle également qu’on est pas obligé de les tailler … Pourquoi ces tailles sont différentes … ? La raison est historique et assez simple, ces trois domaines recevaient des plantes exotiques et ils ont, chacun de leur coté, évolué techniquement différemment … on reconnaitra avec beaucoup de sympathie la taille forestière pratiquée par Compiègne …   le rapport avec  les oliviers … j’y arrive, mais tout d’abord,  notez qu’il est tout de même incroyable que cela soit parvenu jusqu’à nos jours… Vous conviendrez qu’il est préférable que ces trois domaines conservent leur particularité, surtout que cette particularité de gestion se retrouve dans d’autres techniques,  d’autres usages … ( la gestion de l’orangerie par exemple) Conserver les usages et les techniques dans un jardin évite cette banalisation que l’on retrouve malheureusement ailleurs … Il apparait également important qu’un nouveau propriétaire ou gestionnaire comprenne et s’adapte à ces usages, ces techniques … le rapport avec l’huile d’olive corse qui doit ressembler à l’huile provençale ? Non vraiment, je ne vois pas … mais pas du tout …



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