mardi 31 janvier 2012

L'orme ...


L'allée de Retourneloup, à Réveillon, ("L'outil" du  mardi 24 janvier) était en 1663 plantée d'Ormes ... Il est possible depuis une dizaine années de planter à  nouveau  cet arbre. Deux variétés sont résistantes au Graphium ulmi : l’orme « LUTECE ® Nanguen et - l’orme « VADA ® Wanoux.  Lire l'article de Jean Pinon, pathologiste forestier et chercheur à l'INRA à qui l'on doit ces deux nouvelles variétés ... 









vendredi 27 janvier 2012

Le jardinier mène l'enquète ...

La première est que, quand l'honnête jardinier sera une fois parvenu à la connaissance certaine de quelques principes capables de lui donner une bonne teinture du jardinage, on doit être assuré qu'il ne voudra pas s'en tenir à cette simple connaissance des premiers éléments; il lui prendra infailliblement une grande curiosité de savoir davantage une chose qui lui plaît tant. On le verra bientôt après pousser plus avant les lumières qu'il aura acquises et pas conséquent il demeurera peu de temps dans cet état dangereux et redoutable qu'on appelle demi-science.
(Jean-Baptiste la Quintinie, Instructions pour les jardins fruitiers et potagers,1690)


Comment comprendre ce qu'il s'est passé ? Je vous le disais, suite à un abandon même de très longue durée, une composition laisse des traces... les groupes d’arbres également.
Comment les repérer ?
Il faut observer la nature du groupe, celui-ci doit être mono spécifique. Si le groupe est composé de plusieurs variétés d'arbre, on peut raisonnablement penser que le groupe est en train d'évoluer ... on peut également trouver des souches, mais le modelé du terrain parle également. A Bailleul, les groupes d'arbres sont plantés sur une butte. Celle-ci, sera toujours présente même après la disparition des arbres.
Enfin, il faut regarder les arbres. Aux Bordes, nous voyons, par l'absence de branche, un arbre très nettement abandonné par le groupe qui s'échappe... A la Motte-Tilly, le pin n'est que le reste d'un groupe qui a dépéri …





jeudi 26 janvier 2012

et les arbres s'isolent ...

Le jardinage, duquel je commence ici à traiter, produit sûrement beaucoup de plaisir à l'honnête homme qui s'y entend et s'y applique, mais ce même jardin, s'il est entre les mains d'un jardinier qui soit peu habile ou peu laborieux, a de grands inconvénients à craindre et de grands chagrins à donner.
(Jean-Baptiste la Quintinie, Instructions pour les jardins fruitiers et potagers,1690)




Mais comment se déplacent-ils ces groupes d'arbres ? Le système est identique à celui décrit à Champs-sur-Marne. Sans la gestion, le végétal colonise l'espace découvert... Mais un groupe d'arbres est fragile. Il suffit d'un accident, qu'un arbre tombe et le groupe d'arbres dépérit immanquablement. Les raisons sont multiples, la prise au vent et  les échaudures fragilisent les arbres intérieurs restants. Si le jardin est habité, il faut commencer à envisager la régénération. Quand le jardin n'a plus de jardinier, on assiste à un véritable déplacement laissant régulièrement un arbre s'isoler. Dans certains cas la composition initiale du jardin disparait.
À suivre …

mercredi 25 janvier 2012

Les jardins aussi dépriment ...

Si les fleurs, le long des routes
Se mettaient à marcher
C'est à la Margot, sans doute
Qu'elles feraient songer


(Georges Brassens,
Je Suis Un Voyou, 1954)


Quand un jardinier abandonne son jardin, c'est bien connu, le jardin déprime. Cette dépression se traduit par un laisser-aller des formes, bref ! Il grossit, on dit que le jardin se relâche …
Les groupes d'arbres réagissent également. Ils ont tendance à grossir, à se balader dans le jardin, certains, et c'est dramatique, quittent le jardin pour toujours...
Ici, à Bailleul (encore un jardin incroyable) les groupes d'arbres se sont bien laissés aller pendant 50 ans...
Les photographies IGN nous montrent les trois cas : relâchement des formes, déplacement et disparition. Le résultat est une altération de la lecture. Mais sur place, il faut bien avouer que ce n'est pas très gênant. 
Ce qui m’intéresse, c'est d’essayer de comprendre ce qu'il s'est passé …
A suivre ...

mardi 24 janvier 2012

L'outil ...

Comment sentira-t-il les mélanges de la lumière et des ombres, les divers accidents des saisons, les effets de l’air, ceux des distances, les points de vue éloignés qui, pour être hors du temps, n’en font pas moins partie de l’ensemble ? 
Jean-Marie Morel, Théorie des jardins, 1776

Rien ne vaut l’analyse du terrain pour comprendre un jardin, qu’il soit contemporain ou ancien. J’ajouterai, que le terrain en dit même toujours assez, que ce soit pour la gestion ou pour le projet … Mais bon ! Le besoin d’en savoir plus, de confirmer la première analyse est très fort …

Pour en savoir plus, il existe des outils. Mon préféré est sans hésitation aucune : La photographie aérienne. Elle nous raconte l’histoire du 20e siècle, mais aussi celle du 19e voire du 18e…  Elles nous montrent des éléments que l’on ne peut voir à hauteur d’homme … Il est vrai que parfois il n'y a pas grand chose et une photographie aérienne muette provoque toujours une grande déception…

Les photographies aériennes réalisées avant le remembrement gardent en mémoire le territoire, l’organisation, les usages, l’économie des siècles précédents. Ici à Réveillon, la photographie IGN de 1933, nous dévoile une ancienne allée impressionnante, maintenant disparue, plantée par le nommé Jean Galland en  1663. Le parcellaire agricole s’est organisé autour et à l’intérieur de cette axe préservant le dessin initial de l’allée qu’on appelait "Allée de Retourneloup".
Je rectifie donc, la photographie aérienne nous raconte l’histoire du 20e siècle, mais aussi celle du 19e,  du 18e  voire celle du 17e .
Pas mal, non ?

lundi 23 janvier 2012

L'homme-jardinier ...

Si l'homme-jardinier s'était développé, depuis le début du monde, par sélection naturelle, il se serait évidemment transformé en invertébré. Pourquoi diable a-t-il des reins? Il semble que ce soit uniquement pour que, de temps en temps, il se redresse en disant. « J'ai mal aux reins. » Pour ce qui est des jambes, on peut leur donner toutes sortes de positions; on peut s’accroupir, s’agenouiller, s’asseoir à la turque, ou même prendre ses jambes à son cou. Les doigts, eux, sont de bonnes chevilles pour faire les trous, les paumes brisent les mottes ou bien étendent la terre et la tête sert pour accrocher la pipe; seul le dos reste un élément insoumis que le jardinier cherche vainement à courber. Le ver de terre n'a pas de reins, lui. Le jardinier est ordinairement terminé, vers le haut, par son derrière; il a les mains et les jambes écartées et la tête quelque part entre les genoux ...
(Karel Čapek, L’année du jardinier, 1929).




vendredi 20 janvier 2012

Le Jardinier doit estre jeune, soigneux, diligent et assidu...

Le Jardinier doit estre jeune, soigneux, diligent et assidu. Il faut qu'il sçache la région et les effets, au moins, des quatre vents principaux pour faire le discernement d'une bonne situation. Quelque intelligence des ordres de l'Architecture luy est nécessaire pour former la figure d'un Plan et compasser régulièrement les planches d'un Parterre. Il dit aussi connoistre parfaitement toutes sortes de fleurs, pour les sçavoir placer dans les endroits qui leur sont propres. La conduite de la Lune dans son croissant, sa plénitude et son décours est une leçon qu'il doit bien avoir étudiée, car c'est par là qu'il apprend les termes qui sont propres à semer et à planter. Outre ces connoissances pour la pratique de sa profession, il doit avoir fait provision de tous les outils et instrumens qui sont à l'usage du Jardin, qui sont pour faire grossièrement le détail, une bêche, une paële, une pieuche, une serpe, un rasteau, une règle, des cordeaux et une équaire ; deux cribles, un gros pour les oignons et un fin pour les graines; un marteau, un arrosoir et quelques cloches de verre ou de terre cuite, sans ouverture par le haut, avec lesquelles dans les grandes chaleurs de l'été on couvre quelques plantes délicates qui craignent la trop grande ardeur du Soleil; le couteau et la scie pour enter et généralement toutes les commoditez requises pour la culture et la propreté du Jardin. Toutes lesquelles choses il doit serrer dans quelque endroit proche afin de s'en servir au besoin.

(Sieur MORIN, Nouveau traité pour la culture des fleurs qui enseigne la manière de les cultiver, multiplier et les conserver selon leur espèces, avec leur propriétés merveilleuses et les vertus médicinales, 1674)


jeudi 19 janvier 2012

La lutte du Vide contre le Plein à Champs-sur-Marne (fin) ...

La décoration florale? pourquoi voulez vous que je perde du temps pour ça ?
(Pierre Harmel, 1999)






La prairie est restaurée, la lecture du parc redevient cohérente. Malheureusement, la tempête du 26 décembre 1999 a détruit les bosquets du domaine et le tilleul qui donnait son nom à la prairie. 
L’observation in situ des lisières a permis au chef jardinier qui a restauré la prairie, Pierre Harmel, d’émettre une hypothèse très pertinente. Certaines lisières de bosquets étaient droites, comme la face d'un polygone, et non courbes. Elles permettaient, d’après lui, une lecture plus nerveuse du jardin. En effet, une lisière courbe dévoile peu à peu un point de vue, une lisière en ligne droite dévoile immédiatement, brutalement un point de vue… La photographie aérienne de 1933 confirme cette hypothèse. 
Ce n’est pas grand chose me direz vous… mais des bosquets aux lisières régulières dans un jardin irrégulier ce n’est pas mal, non ? 

mercredi 18 janvier 2012

La lutte du Vide contre le Plein à Champs-sur-Marne (suite) ...

Tout ce que l'homme abandonne au temps offre au paysage une chance d'être, à la fois marqué par lui et affranchi de lui.

(Gilles Clément, le jardin en mouvement, de la vallée au parc André Ciroën, 1991)


La nature, qui a horreur du vide, a bien aidé les jardiniers du parc de Champs-sur-Marne à faire oublier la prairie du Tilleul. La conquête par le végétal d’un espace abandonné me rassure toujours. L’amateur de jardin tentera de faire la part des choses :
de ce qui relève de la conquête par la dynamique végétale … 
de ce qui relève de la composition du jardin … 
Le jardin, même après une longue période d'abandon laisse des traces. Ce vide entre l’ancien bosquet et la nouvelle parcelle boisée est la trace de l’ancienne lisière. Elle servira de point de départ à la reconquête paysagère de la prairie...

mardi 17 janvier 2012

La lutte du Vide contre le Plein à Champs-sur-Marne...

Une des principales raisons pour laquelle ces gens-là n'ont pas l'intelligence nécessaire pour composer un beau dessein, c'est que cette connoissance dépend de plusieurs autres. Il faut être un peu Géométre, sçavoir l'Architecture, et la bien dessiner, entendre l'ornement, connoître la propriété et l'effet de tous les plans dont on se sert dans les beaux Jardins, inventer facilement, et y joindre une intelligence et un bon goût, qu'il faut s'être formé par la vûe des belles choses, par la critique des mauvaises, et par une pratique consommée dans l'Art du Jardinage.
(Antoine-Joseph Dézalier d’Argenville, La théorie et la pratique du jardinage, 1709)




Mais que s’est-il passé au domaine national de Champs-sur Marne entre 1933 et 1987 ? Il semblerait, en regardant les photographies aériennes de l’IGN, que les jardiniers du domaine aient soigneusement évité la prairie du Tilleul. Mais pourquoi ? Difficulté de gestion ? une fauche annuelle suffisait... Plus assez de jardinier ? Je ne pense pas, le reste du jardin semble continuer sa vie de jardin… les alignements, la broderie, le  jardin régulier et ses abords sont très entretenus... Il est également curieux que ce type d’histoire se répète dans beaucoup de jardins paysagers. Cette période a ignoré les jardins paysagers, ignoré l’importance du couvert et du découvert, du vide et du plein. Alors, on peut se demander si ce n'est pas tout simplement l'ignorance qui a transformé la prairie en bois …

lundi 16 janvier 2012

Le sol ...

D’aucuns prétendent qu’il faut y mettre du charbon de bois tandis que d’autres le nient. Certains recommandent un peu de sable jaune, parce que, disent-ils, il contient du fer, mais d’autres le repoussent pour cette simple raison qu’il contient du fer. D’autres encore sont partisans du sable de rivière pur, d’autres de la simple tourbe et d’autre de la sciure de bois. Bref, la préparation de la terre à semences est un grand mystère et comporte des cérémonies magiques. Il faut y mêler de la poussière de marbre (mais où la prendre ?), de la bouse de vache de trois ans (ici, on se demande si cette indication d’âge se rapporte à la vache ou à la bouse), une pincée de terre de taupinière fraiche, de l’argile réduite en poudre prise dans une vielle étable à porcs, du sable de l’Elbe (mais pas de la Vltava), de la terre de bûcher vielle de trois ans et peut-être encore de l’humus de fougère dorée ainsi qu’une poignée de terre prise sur la tombe d’une vierge pendue ; il faut mélanger tout cela suivant les règles (les manuels de jardinage ne disent pas s’il faut le faire pendant la nouvelle lune, à la pleine lune ou pendant la nuit de saint Philippe et saint Jacques) ; et lorsque vous versez cette terre mystérieuse dans vos pots de fleurs ( trempés dans l’eau stagnant depuis trois ans au soleil et remplis dans le fond de tessons bouillis, mêlés à des morceaux de charbon de bois, ce qui du reste est nié par d’autres auteurs) lorsque vous avez fait tout cela, en observant des centaines de prescriptions qui diffèrent du tout au tout, ce qui rend singulièrement difficile cette cérémonie, vous pouvez vous attaquer à l’essentiel de l’opération, c'est-à-dire que vous pouvez semer vos graines…

(Karel Čapek, L’année du jardinier, 1929).


vendredi 13 janvier 2012

Le Vide, le Plein et maintenant l'Échelle …

On se propose de rechercher ici les secours, les avantages qui pourraient avoir été négligés; de détailler les moyens à employer dans la décoration des jardins, l'usage que l'on peut faire du paysage pour remplacer la géométrie; l'emploi et la distinction des ornements naturels et des ornements factices; comment on peut embellir l'horizon, le lointain, travailler le terrain sans monotonie, choisir un sujet pour la composition de l'ensemble, traiter ce sujet avec assez de suite pour que ceux qui ne sont pas propriétaires se promènent avec intérêt, comment on peut ne jamais avoir le jardin des autres, comme jamais on n'a bien exactement leur local.
(Jean-Marie MOREL, Théorie des jardins, 1776)









Le parc de la Varenne à Haironville, est à la fois très simple et très compliqué … très simple parce que uniquement composé d’une grande prairie et de quelques groupes d’arbres* apparemment plantés de-ci delà  … très compliqué, parce que bourré d’effets … on joue sur l’échelle créé par les groupes d’arbres.
Le premier effet est dû à l’éloignement des groupes d’arbres du château. (le plus proche est à 270 m) mais un groupe d’arbres figure un arbre isolé. Donc on perçoit à la fois un éloignement et en même temps une proximité … perturbant ! 
Une fois qu’on a compris, c’est l’immensité qui prime … Arrivé au point de vue principal, les groupes d’arbres paraissent plus compacts et chose surprenante, ces groupes d’arbres, pourtant décalés, créent une unité de boisement. Le but principal est une vue très cadrée sur le château. Pas mal, non ?






*Le Groupe d'arbres est composé de sujets de haute et moyenne futaie plantés à proximité les uns les autres. ne pas confondre avec le Clump ou le massif d'arbres ... (pour en savoir plus : Marie-Hélène Bénetière, Vocabulaire typologique et technique, 2000.)












jeudi 12 janvier 2012

Echelle ? ...

Le jardin n’a pas d’échelle. C’est le miroir des jardiniers. Tout dépend de lui, de son rêve.
(Gilles CLÉMENT, Les libres jardins, 1997)

mercredi 11 janvier 2012

Le piège ô combien agréable de l'arbre légendaire ...

"On est dans l'Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, alors on publie la légende"
(John Ford, The Man Who Shot Liberty Valance, 1962)  
Moi, je l'aime bien l'arbre légendaire ! On a beau dire ce qu'on veut, son propriétaire vous répondra « oui mais il a été planté par Buffon, » ou bien «  il a été offert par Murat à Joséphine » qu'il soit beau ou laid, bien ou mal placé, la seule chose qui compte c'est l'histoire qu'on raconte. Les plus attachants sont sûrement ceux qui racontent une histoire familiale comme celle que je ne vous raconterai pas du Chêne des Amoureux du magnifique parc de Digoine.   Mon préféré est le châtaigner d'Anne de Bretagne à Bonnefontaine, non pas pour des raisons régionalistes mais parce qu'il m'a fait comprendre que le mythe « en » jardin était bien plus important que la réalité historique du lieu. La première fois que j'ai vu ce châtaignier, un ami doutait que cet arbre puisse avoir 600 ans, je lui répondais qu'en fait, on s'en fichait, seule la légende était importante.
Mais lui, ce châtaigner, il a dépassé la légende, il s'est transformé en une en œuvre d'art sculptée par le temps, comme si le temps devenait lui-même un artiste influencé par les œuvres de Giuseppe Penone ou d'Hubert Robert. Quand même ! Quelle carrière pour ce châtaignier …

mardi 10 janvier 2012

Le piège de l’arbre tant aimé ...

Le Phytolacca du bastion de Bab Marrakech, un arbre à la fois mémoire et témoin de l’histoire de la ville, est mort, victime de l’inculture et de l’inconscience des hommes.
(Nour Eddine Ottmani, Grave atteinte au patrimoine végétal, 2012)



La perte d’un arbre cher est vécue comme un drame. Ici, dans le jardin du Palais Borromée à Isola Madre sur le lac Majeur, ce Cyprès du Cachemire était considéré comme « le plus bel arbre du monde ». Suite à un coup de vent, il est tombé. Les propriétaires l’ont redressé. Un véritable exploit technique ! Maintenant l’arbre est debout. Terriblement atrophié et maintenu par des câbles, il ne sera jamais comme avant.




Pourtant, qu’il était mal placé cet arbre ! Juste en plein dans l’axe, la vue sur le Palais n’existait plus. Fallait-il le garder ? D’un point de vue de la composition, la réponse est non, d’un point de vue esthétique, non plus, d’un point de vue botanique, je ne pense pas. Je comprends bien évidement ce geste mais l’important est de conserver, de prolonger le jardin non pas les végétaux à tout prix. Alors non, il ne fallait pas le garder… je pense qu’il fallait le remplacer...

lundi 9 janvier 2012

Le piège de l'arbre isolé ...

Dans cette aventure, le grand perdant a été le tracé de jardin : tantôt il a perdu forme, noyé sous une surabondance de fleurs, tantôt il s’est vu surcharger des nouveaux apports indigestes. 
(Russell PAGE, L’éducation d’un jardinier, 1962)






Planter un arbre est chose facile, bien le placer est moins évident. Il arrive régulièrement que l’arbre soit disposé selon un seul point de vue, généralement pour être vu de la maison. Pour cela on choisit un beau vide, bien dégagé pour que l’arbre puisse se développer.
Le piège est là !
Il faut une vue vers le lointain, vers un point d’appel, vers un point focal … notre arbre peut être ce fameux point focal. Il ne faut pas oublier la vue inverse : comment est perçu le bâtiment du lointain. Dans l’exemple d’aujourd’hui, Le Cèdre est placé exactement dans un cône de vue et la vue sur le château est altérée...

vendredi 6 janvier 2012

L’allée des Beaumonts : paysage ou jardin ?


La création des vues dans les jardins paysagers a le plus souvent pour objet d’augmenter l’étendue fictive des propriétés. Plusieurs moyens sont employés pour obtenir ce résultat, parmi lesquels nous compterons les percées dans les lignes de bordures plantées, les clôtures dissimulées, les vallonnements, les allées masquées, les plantations...
(Edouard André, Traité général de la composition des Parcs & Jardins, 1879)






Percée dans les années 1810, l’allée des Beaumonts, (4 km) est attribuée à Napoléon 1er . Elle prolonge le Petit Parc de Compiègne, elle prolonge le regard, c'est une vue …  C’est un des rares exemples de paysage créé non pas par des usages économiques ou culturels mais par la volonté d’un seul homme, la volonté de fabriquer de toutes pièces une vue, un paysage … Si bien que l’on peut se demander ce qu’est véritablement l’allée des Beaumonts : un paysage ou un jardin ? 

jeudi 5 janvier 2012

Fleurs ...

Tant qu'on est dans la fleur de la jeunesse, on pense qu'une fleur est quelque chose que l'on porte à la boutonnière et que l'on offre aux jeunes filles. On n'a absolument aucun sentiment qu'une fleur est quelque chose qui hiverne, qui se bêche, se fume, s'arrose, se transplante, quelque chose qu'il faut tailler, attacher, sarcler, débarrasser des lichens, des feuilles sèches, des pucerons et des moisissures; au lieu de bêcher les plates-bandes, on court le guilledou, on satisfait son ambition, on jouit des fruits de la vie que l'on n'a pas fait pousser soi-même et, en somme, on a une activité purement destructrice. Il est besoin d'une certaine maturité, je dirais volontiers d'un certain âge de paternité pour pouvoir devenir jardinier amateur. En outre, il est nécessaire d'avoir un jardin.

(Karel Čapek, L’année du jardinier, 1929).

mercredi 4 janvier 2012

Le Petit Parc de Compiègne et l'église Saint-jacques ...

"Si l’on souhaite enchâsser dans son propre jardin les merveilles d’un autre, il suffit qu’il y ait une lien entre eux pour que la continuité de l’espace ne soit pas rompue. L’emprunt de scène sera alors particulièrement approprié"
(JI CHENG, Yuanye, Le traité du jardin, 1634)

Ici en 1811, au Petit Parc de Compiègne, Louis-Martin Berthault crée une vue entre deux bosquets vers l’église Saint-Jacques située bien au-delà des limites du domaine. Ce simple geste lui permet d’intégrer l’église dans le parc. L’église Saint-Jacques devient alors une Fabrique* du Petit Parc

Fabrique : petite construction de jardin. (En savoir plus : Marie-Hélène Bénetière, Vocabulaire typologique et technique, 2000.)













mardi 3 janvier 2012

La percée en X du Petit Parc de Compiègne ...

Il arrive fréquemment que la vue est réciproque, c'est-à-dire que les deux extrémités peuvent devenir respectivement sommet et base de l’angle. Dans ce cas, on commet souvent une faute qui doit être signalée : celle de donner aux deux cotés de la percée une direction parallèle. Il en résulte que les deux cotés ont une apparence de murs.
La percée en X évite cet inconvénient, tout en reculant la perspective et laissant l’objet visible dans toute sa largeur, du sommet de chacun des deux angles. Le bois peut s'avancer de chaque coté et donner à cette vue un encadrement excellent...
(Edouard André, Traité général de la composition des Parcs & Jardins, 1879)




Au Petit Parc de Compiègne, Louis-Martin Berthault cherche à resserrer la façade du château (on dira pourquoi un autre jour). Il utilise le procédé décrit 70 ans plus tard par Edouard André : La percée en X.  Ici, afin d’éviter un étranglement de la prairie, Louis-Martin Berthault décale deux bosquets (le A et le B). Sur place, cet artifice est quasiment imperceptible… 

lundi 2 janvier 2012

Janvier ...

"Le mois de janvier lui-même n'est pas une période de repos pour le jardinier », disent les manuels de jardinage. Certainement pas: car, en janvier, le jardinier cultive surtout le temps. C'est une drôle de chose que le temps; il n'est jamais comme il devrait être; il exagère toujours dans un sens ou dans l'autre. La température n'est jamais conforme à la normale séculaire; elle la dépasse toujours de 5 degrés à moins qu'elle ne lui soit inférieure d'autant. Quant aux pluies, si elles ne sont pas inférieures de 10 millimètres à la normale, elles lui sont supérieures de 20 millimètres; s'il ne fait pas trop sec, il fait inéluctablement trop humide.Si les gens eux-mêmes que cela ne regarde pas ont tant de motifs de se plaindre du temps, que doit dire le jardinier! S'il tombe peu de neige, il gronde, avec raison, que c'est tout à fait insuffisant; s'il en tombe beaucoup, il manifeste de sérieuses craintes que cela ne lui brise ses conifères et ses rhododendrons.S'il n'y a pas de neige du tout, il se lamente sur les dégâts que font les gelées blanches. Le dégel survient-il, il maudit les vents furieux qui l'accompagnent et qui ont l'odieuse habitude de disperser à travers le jardin les couvertures de paille et de branchages et qui pourraient bien puissent-ils aller au diable lui rompre quelque arbuste. Si le soleil a l'audace de briller un peu en janvier, le jardinier se prend la tête à deux mains, car la sève de ses arbrisseaux va monter prématurément. S'il pleut, il craint pour ses fleurs alpestres; s'il fait sec, il pense avec douleur à ses rhododendrons et à ses andromèdes.Et pourtant il ne serait pas bien difficile de le contenter: il lui suffirait que, du 1er au 31 janvier, il y eût 9 / 10e de degré au-dessous de zéro, 127 millimètres de neige (légère et, autant que possible, fraîche) , un ciel presque constamment nuageux, pas de vent ou des vents d'ouest modérés, et tout irait bien. Mais voilà: personne ne se soucie de nous autres, jardiniers, et personne ne nous consulte sur ce qui devrait être. Et voilà pourquoi ce monde va de la sorte."

(Karel Čapek, L’année du jardinier, 1929).