Si l'on s'en rapporte à la seule nature, les arbres ne doivent pas être disposés à des distances égales, et sur des lignes régulières : c'est au hasard qu'ils se reproduisent. Ce sont des graines jetées au gré des vents, ou des rejetons qui les multiplient.
Par le premier moyen ils se trouvent placés sans symétrie ; par le second ils se groupent : et c'est se rapprocher du modèle qu'on ne doit point perdre de vue, que de le disposer le plus souvent ainsi. Cette manière de les présenter est aussi bien plus favorable à l'effet et à la variété. Les peintres la saisissent avec empressement ; et s'ils n'y sont absolument contraints, ils ne représentent point des palissades, et des allées bien alignées.
C'est ici le lieu de dire que la pierre de touche de la plupart des scènes pittoresques qu'on dispose dans les jardins ou dans les parcs, est le sentiment qu'ils inspirent aux artistes.
Si la scène est digne d'être avouée par la nature, le peintre se récrie. Il désire de l'imiter ; et s'il l'imite, la représentation devient piquante et agréable.
La disposition des arbres est cependant soumise à certains égards aux circonstances, et à la destination des lieux où on les emploie. Le bon goût s'attache à certaines règles ; le meilleur admet des exceptions et n'est point exclusif; mais soit qu'on emploie les arbres symétriquement, soit qu'on les dispose et qu'on les groupe d'une manière pittoresque ; il est nécessaire de bien prévoir l'effet qu'ils produiront, lorsqu'ils auront atteint leur grosseur et leur 616vation moyenne. Cette prévoyance indispensable pour la réussite des effets exige encore une habitude de réfléchir sur les proportions, et un tact qui a une grande liaison avec les idées de composition dans l'art de peinture, puisqu'il s'agit de rapports et de contraste.
II n'est pas moins nécessaire, même en variant les espèces d'arbres et d'arbustes, de les choisir convenables a la qualité du terrain. Ce soin contribue a l'effet, mais encore plus a la promptitude de la jouissance ; il ajoute aussi beaucoup a l'impression qu'on a dessein de faire naitre. Une végétation facile, prompte et animée donne une idée de mouvement qui manque, comme je l'ai dit, le plus ordinairement aux scènes ; elle rappelle aussi les sentiments attaches a l'abondance, a la richesse, a. la force, a la beauté.
(Claude-Henri Watelet,
Essai sur les Jardins, 1774)
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