On dit que « le temps amène les roses » ; c'est évidemment vrai — d'ordinaire, elles se font attendre jusqu'en juin ou juillet — et, pour ce qui est de la croissance, il suffit de trois ans pour qu'un rosier vous fournisse un fort joli buisson. Mais on ferait bien mieux de dire que le temps amène les chênes, ou les bouleaux. J'ai planté quelques bouleaux en me disant : « ici, ce sera un boqueteau de bouleaux; et dans ce coin-ci se dressera un énorme chêne centenaire. » Et j'ai planté un petit chêne, et deux ans ont passé déjà et ce n'est pas encore un énorme chêne centenaire, et mes bouleaux sont loin de former un bosquet centenaire, où viendraient danser les nymphes. Bien entendu, j'attendrai encore quelques années; nous, les jardiniers, nous avons une infinie patience. J'ai dans ma pelouse un cèdre du Liban, presque aussi grand que moi. D'après des renseignements autorisés, le cèdre doit atteindre une hauteur de cent mètres avec une largeur de seize mètres. Eh bien, je voudrais vivre assez longtemps pour le voir atteindre les dimensions prescrites; il conviendrait réellement que je voie cela et que, si j'ose dire, je recueille le fruit de ma peine. Pour le moment, il a poussé de vingt-six bons centimètres; bon, j'attendrai encore.
(Karel Čapek, L’année du jardinier, 1929)
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