Le jardin décrit et génère sa possible incarnation : il peut
exister en tant qu'in situ, en tant que lieu construit. Merveille des
merveilles puisqu'il s'agit là d'incarner sur terre, de manière terrestre, dans
un monde soumis au règne de la nécessité et de la corruption, un lieu
inimaginable, intemporel, un éternel printemps, une victoire sur le temps
corrupteur et l'espace limité. On perçoit ainsi le profond paradoxe du jardin que
reflète la définition de ses premiers éléments constitutifs : un lieu clos, fini
et limité où s'épanouissent pourtant l'illimitation de l'espace et du temps,
l'infini et l'éternité. Les descriptions tentent de rendre compte d'un effet
d'irréalité et de victoire sur l'incrédulité, générant par là le désir de
relever le défi, de traduire dans les mots ou dans l'in situ l'éblouissement d'une rencontre aveuglante et inoubliable.
On peut se poser la question de savoir si un lieu, a fortiori un haut lieu peut être édifié et prendre forme sans une
part de mots et inversement, si le récit, aussi mythique et rêvé soit-il,
n'attend pas sa réalisation ou, plus précisément, l'espoir que ce qui n'était
que description et rêve puisse devenir réalité et s'incarner dans le monde,
autrement dit si un tel lieu ne crée pas une attente eschatologique ou
herméneutique, un projet de monde historique. Le thème du jardin donnerait
forme et réponse à cette question, il s'incarne en tant que représentation -
texte littéraire et poétique, image et vision associée à un lieu de rêve - et
en tant qu'art in situ, en tant que
lieu construit associé ou non à une architecture, élément constitutif
nécessaire à la bonne organisation d'un ensemble plus vaste, un quartier, une
ville, voire d'un territoire tout entier. Le thème du jardin devient le cœur
conscient de la mise en forme des lieux de l'habiter.
(Philippe Nys, Jardins et institution symbolique, Histoire de jardins, 2001)
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Phaistos |
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Spinalonga |
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Méréville |
J'aime les ruines ... une cité en ruine est le royaume du ressenti... tout comme un jardin, ... Pour avoir visité le Château de Coucy avec un archéologue spécialiste de la construction médiévale, je peux vous affirmer qu'on passe à peu près à coté de tout quand on visite un site archéologique ... Certes, on peut lire avant ... je préfère lire après .... J'aime ne rien savoir avant (je fais pareil pour les jardins) j'aime m'imprégner, ressentir le lieu, imaginer les gens monter ces escaliers que j'aime tant, rêver à Phaistos en contemplant un paysage cultivé depuis 4000 ans ... ressentir un lieu est probablement un art ... il faut s'entraîner, il faut l'accepter, se libérer ... j'ai visité je ne sais pas combien de fois Méréville ... à chaque fois je pleure ... ou presque ...
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Quinta da Regailera - Jules travaillant l'art du ressenti ou en attente eschatologique ??? |
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